D’après Carmen de Georges Bizet, Prosper Mérimée, Henri Meilhac et Ludovic Halévy
Durée : 1h20
Il y a Carmen, le célèbre opéra de Bizet. Et il y a La Tragédie de Carmen, version resserrée et saisissante imaginée par Marius Constant, Peter Brook et Jean-Claude Carrière, qui tire la quintessence de l’histoire de l’ensorcelante bohémienne. Renouvelant le mythe de Prosper Mérimée, La Tragédie de Carmen nous entraîne dans cette "foudroyante et fascinante chevauchée du côté de la mort".
Cette adaptation propose une lecture dramaturgique et musicale très personnelle des pages de Bizet, mais aussi des textes de Mérimée et, plus largement, de la notion même de tragédie. Elle reprend les grands airs de la partition et les agence dans un ordre qui renouvelle notre appréhension de l'œuvre en nous étonnant. Elle aligne le temps musical sur un temps théâtral resserré, accroît l’urgence dramatique du récit et accélère l’enchaînement des situations. Des choix radicaux assumés qui nous proposent de renouveler notre expérience du mythe Carmen.
Note d'intention
Près de trente-huit ans après sa création aux Bouffes du Nord, La Tragédie de Carmen imaginée par Marius Constant, Peter Brook et Jean-Claude Carrière à partir du célèbre titre créé en 1875 à l’Opéra-Comique, n’a rien perdu de son acuité.
Loin de n’être que la réduction chambriste d’une œuvre d’envergure, cette adaptation propose une lecture dramaturgique et musicale très personnelle des pages de Bizet, mais aussi des textes de Mérimée (Carmen bien sûr, mais aussi La Venus d’Ille, Colomba, Mateo Falcone ou encore Les lettres d’Espagne), et, plus largement, de la notion-même de tragédie.
Elle reprend certains des grands airs de la partition mais les agence dans un ordre qui renouvelle notre appréhension de l’œuvre en nous étonnant. Elle aligne le temps musical sur un temps théâtral resserré, accroît l’urgence dramatique du récit et accélère l’enchaînement des situations. Elle évacue les chœurs pour se concentrer sur la dimension intime des relations entre les personnages. Elle braque plus précisément la lumière sur le quatuor formé par Carmen, José, Micaëla, Escamillo, aux détriments des figures secondaires. Elle n’hésite pas à modifier le cours des évènements (ici, Escamillo ne connaît pas le même sort que chez Bizet) ou même à faire ressurgir des personnages présents chez Mérimée (comme Garcia, le mari de Carmen) mais écartés par les librettistes de Bizet. Ces choix radicaux, qui surprendront à plusieurs moments l’auditeur averti, nous proposent de renouveler notre expérience du mythe Carmen.
Loin de vouloir nous dissuader de revenir à la pièce maîtresse de Bizet, cette version plus nocturne et par moment inquiétante nous invite à être sensible, le temps d’un spectacle, à l’humanité bouleversante de ses personnages, à leurs douleurs autant qu’à leurs sourires, à la présence essentielle de la fatalité tragique voire de la magie noire qui hante les écrits de Mérimée, aux spécificités charnelles et poétiques de l’imaginaire andalou, à la place fondamentale que Bizet accorde aux mots et aux timbres orchestraux dans sa conception de l’art lyrique.
Pour donner corps, aujourd’hui, à cette adaptation décantée, nous avons cherché à faire surgir sur scène des formes circulaires et des images étranges, comme pour embarquer les interprètes dans la spirale fuyante du désir et dans une fantasmagorie méridionale tendue entre sensualité et prémonitions énigmatiques. Au cœur d’un univers aride, pas loin de faire écho aux textes de Federico Garcia Lorca, les silhouettes se découpent en teintes sombres. Elles sont habitées par ce « duende » que le poète andalou décrivait comme un « je-ne-sais-quoi », un « feu follet » , l’« esprit caché de la douloureuse Espagne ». Elles s’attirent et se repoussent dans une conscience tragique de la liberté. Dans cette adaptation, Escamillo a beau s’effondrer dans l’arène, Carmen ne veut pas pour autant suivre José. C’est que, plus encore que chez Meilhac et Halévy, la bohémienne fait ici figure de femme iconoclaste, assumant dans le rire son indépendance face à un patriarcat étouffant : « Carmen sera toujours libre. Calli elle est née, Calli elle mourra » (Mérimée). Pour faire entendre cela, les interprètes ne sont pas loin des musiciens ; les mots se chantent au plus près des spectateurs, dans une intimité retrouvée.
Bon voyage dans les chemins de cette autre et très singulière Carmen !
Florent Siaud, metteur en scène
Production du Théâtre Impérial – Opéra de Compiègne
Coproduction avec L’Ensemble Miroirs Étendus ; Le Théâtre Impérial – Opéra de Compiègne est soutenu par la Ville de Compiègne, le Ministère de la Culture - DRAC Hauts-de-France, la Région Hauts-de-France et le Département de l’Oise.
© Estive de Foix
Distribution
- Adaptation : Peter Brook, Marius Constant et Jean-Claude Carrière
- Direction musicale : James Salomon Kahane
- Mise en scène : Florent Siaud
- Assisté de : Jean Hostache et Johannes Haider
- Scénographie et costumes : Romain Fabre
- Lumières : Cédric Delorme-Bouchard
- Vidéo : Thomas Israël
- Avec : Julie Rochard-Gendre
- Marianne Croux
- Thomas Dolié
- Nicolas Vial
- Sébastien Droy
- Laurent Evuort-Orlandi
- Ensemble Miroirs Étendus